La croissance démographique, un atout ou un frein pour le développement d'un pays?
Interrogé sur le développement de l'Afrique au G20 à Hambourg en Allemagne le 8 juillet dernier, le chef de l’État français, Emmnuel Macron s'en ai pris au ventre des femmes africaines en ciblant les "7 à 8 enfants" qu'elles ont, comme un problème "civilisationnel".
Pour lui, le sous-développement de l’Afrique ne serait pas dû à la misère, à la pauvreté ou à des années sous l’emprise du colonialisme et de l’esclavagisme mais à une autre raison, "beaucoup plus profonde".
"Quels sont les problèmes ? Les États faillis ou les transitions démocratiques complexes, la transition démographique qui est l’un des défis essentiel de l’Afrique", a-t-il énuméré avant d’ajouter : "Dans un pays qui compte encore sept à huit enfants par femme, vous pouvez décider d’y dépenser des milliards d’euros, vous ne stabiliserez rien." Des propos qui ont choqué et offusqué de nombreux Africains qui y voit une manière très réductrice d’expliquer le sous-développement du continent.
Ainsi, comme l'a rappelé dans le quotidien français Libération, la politologue Françoise Vergès auteure du livre Le Ventre des Femmes paru en mars 2017, "On rend les femmes du tiers-monde responsables du sous-développement. En réalité, on inverse la causalité : la plupart des études prouvent aujourd’hui que c’est le sous-développement qui entraîne la surpopulation".
"La théorie de la surpopulation évite aussi de questionner le rôle du colonialisme et de l’impérialisme dans la pauvreté. Et ces discours visent, bien sûr, avant tout les femmes.", a-t-elle conclu. Dans son ouvrage, elle met en lumière un scandale des années 1970 survenu sur l’île de la Réunion, où les femmes étaient contraintes aux avortements forcés et aux stérilisations par des médecins blancs, sans consentement.
Alors, la croissance démographique est-elle un atout ou un frein pour le développement économique d'un pays? Il s'agit là d'une question que beaucoup de démographes se posent depuis très longtemps sans y avoir pour autant, répondu très clairement. Et cela entre autres, "pour des raisons de contexte historique, politique, géographique", a raconté Henri Leridon Démographe et chercheur émérite à l'Institut national des études démographiques en France, sur le plateau du journal Afrique de TV5Monde.
Selon lui, si on se fie à l'histoire des développements des pays, on constate que la plupart des pays qui ont connu un fort taux de croissance économique, ont enregistré parallèlement une baisse de fécondité rapide. C'est le cas des pays comme la Corée du Sud, Taïwan et la Chine en Asie, au début des années 60. "Il y avait 5 à 6 enfants par femme, ce qui est la moyenne du continent africain, du moins de l'Afrique subsaharienne aujourd'hui. Et en 15 ans, leur fécondité a baissé de moitié, ce qui correspond aux années de leur décollage économique", a-t-il précisé avant de conclure : "même si, cette baisse de la fécondité n'est pas la cause de leur décollage économique, il n'en reste pas moins qu'on voit que les deux vont ensemble".
Quoi qu'il en soit, petit rappel pour Monsieur Macron, l’Afrique subsaharienne a enregistré selon la Banque mondiale, son plus faible taux de croissance en 2016. L’insitution internationale pointait alors un tout autre facteur, qui n’a rien à avoir avec le "ventre" des femmes africaines. Pour la Banque mondiale, "les difficultés rencontrées par les plus grandes économies de la région", explique cet effondrement du taux de croissance."Principaux exportateurs de matières premières, ces pays subissent toujours les conséquences de la chute des cours, doivent faire face à des conditions de financement moins favorables et réajuster leur cadre macroéconomique.", selon l'analyse de la Banque mondiale.

Vitraulle Mboungou
Actuelle rédactrice en chef adjointe d’Afrique Expansion Magazine, Vitraulle Mboungou a plus de 8 ans d’expérience dans la presse écrite aussi bien web que papier. Attirée par l’actualité africaine, elle est passée par divers médias spécialisés sur le continent africain et sa diaspora.
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